L’école Émeriau accueille un public très hétérogène avec une proportion importante d’élèves allophones. Cette diversité est un atout culturel mais engendre des difficultés d’organisation et d’apprentissage. En effet les différences entre les élèves d’un même niveau sont très marquées et une gestion par niveau permettait difficilement une différentiation efficace.
Depuis six ans l’équipe pédagogique a fait le choix de tester de nouvelles pratiques en s’inspirant de plusieurs courants pédagogiques tout en partant d’un principe de base : s’adapter au rythme de chacun. Le point le plus révélateur de cette réorganisation a été la mise en place progressive de classes multiniveaux, petits-moyens ou petits-moyens-grands.
La gestion du rythme individuel
Le principal levier utilisé pour faire face à cette hétérogénéité est une individualisation complète de toutes les activités proposées en classe. Chaque élève choisit les activités qu’il souhaite réaliser, leur niveau de difficulté et leur thème.
La classe est organisée par pôles d’activités afin de permettre aux enfants de se repérer seuls et de faire leurs choix facilement. Cela demande du matériel conséquent et adapté mais cela invite les élèves à être pleinement acteurs dans leur classe en étant responsables du rangement et de l’entretien de ce matériel.
Les enseignantes guident les élèves en partant de leurs envies et en suivant trois étapes principales :
- une découverte et explicitation complète de l’activité et de ses niveaux de difficulté
- une pratique en autonomie ou très petits groupes avec un appel uniquement en cas de besoin
- une invitation à passer à la difficulté supérieure lorsqu’une activité est bien maîtrisée.
Le suivi est donc totalement individualisé et chaque enfant sait où il en est dans sa progression.
Le groupe, l'autonomie et la préparation au CP
Un des effets de ces pratiques est l’acquisition par les élèves d’une grande autonomie dans le comportement, les savoirs et les savoirs faire. C’est tout d’abord la capacité de travailler seul qui est acquise tout en ayant un objectif personnel de fixé. Au-delà de la responsabilité du matériel et de la bonne tenue de la classe, cette autonomie confère aux élèves une assurance dans leurs choix et apporte un regard réflexif sur leur niveau ainsi que leurs capacités à un instant donné.
Les activités ne sont pas toujours individuelles et parfois permettent à plusieurs élèves de mettre en place un tutorat. Les élèves s’expliquent entre eux les activités et peuvent s'interroger entre eux. Ces groupes à géométrie variable créent un vrai lien dans la classe, entre les âges, et permet un apprentissage s’appuyant sur l’erreur, la validation par les pairs.
Ces pratiques n’effacent pas l’enjeu de l’entrée au cours préparatoire. Les enseignantes sont soucieuses d’instaurer des moments de regroupement, des rituels et du travail sur table afin d’amorcer une transition vers un fonctionnement plus classique. Ce sont des élèves à la fois autonomes et cadrés qui arrivent à l’école élémentaire voisine.
La cour Oasis
L’école bénéficie d’une cour Oasis dont les élèves ont la charge de l’entretien. Cette cour est le prolongement direct de la pédagogie menée en classe avec un accent mis sur la collaboration entre élèves, l’autonomie et le respect des lieux et matériels. La directrice note un climat plus apaisé à la fois dans les classes et hors des classes avec une baisse significative des incidents.
L'impact sur le climat scolaire
Cette vision est adoptée par la quasi-totalité des enseignantes en place, avec un appui soutenu de la directrice. Si elle demande un lâcher-prise certain, à la fois dans la posture de l’enseignant mais aussi dans la maîtrise des apprentissages, l’unanimité est claire sur le bénéfice au quotidien des professeures. La classe est plus apaisée et la sensation de courir après les progressions est bien moindre. Le sentiment de fournir à chaque élève ce dont il a besoin a pour effet direct de satisfaire les enseignantes en redonnant du sens et de l’ampleur à leur enseignement jusque-là contraint par le rythme.
Les perspectives
Certaines enseignantes se forment à la neuroéducation à travers un D.U. et l’école noue des partenariats avec des organismes de recherche comme le LAPSYDE ou 1er CRI. L’objectif est de consolider les pratiques tout en les validant par une évaluation solide. De plus, ces éléments commencent à rayonner hors de l’école maternelle puisque le projet pourrait potentiellement créer une passerelle avec l’école élémentaire qui va se voir dotée elle aussi d’une cour oasis.
C’est une équipe unie et motivée qui continuera à bénéficier de l'accompagnement de la Cardie en 2022-2023 pour faire évoluer son projet avec toujours le souci premier d'améliorer conjointement les apprentissages et le bien-être des élèves.
La vidéo
Retrouvez ci-dessous la vidéo réalisée par Emmanuel Albert, conseiller en développement de la CARDIE et accompagnateur du projet.
Mise à jour : juillet 2022